Généralités : Syndrome auto-inflammatoire par haploinsuffisance de TNFAIP3/A20

Généralités
Description de la pathologie
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    Résumé par le Dr Ines ELHANI (Janvier 2023)

    Service de Médecine Interne, CeRéMAIA, CH Tenon, Paris

    Épidémiologie

    • Maladie rare, incidence et prévalence inconnues
    • Moins de 200 observations rapportées fin 2022
    • Prédominance féminine : sex ratio de 2 femmes pour 1 homme
    • Distribution cosmopolite dans le Monde
    • Début dans l’enfance, le plus souvent avant l’âge de 10 ans

    Génétique et Physiopathologie

    Le syndrome auto-inflammatoire par haploinsuffisance de A20 (ou haploinsuffisance de A20=HA20) est une maladie autosomique dominante liée à une mutation ou une délétion dans le gène TNFAIP3 (tumor necrosis factor α induced protein 3, A20) se situant sur le chromosome 6 et comportant 9 exons.

    Le gène TNFAIP3 code la protéine A20 qui intervient dans la régulation négative de la voie de signalisation du NF-KB, impliquée dans la réponse immunitaire.

    L’haploinsuffisance de A20 entraine la perte d’une des copies du gène TTNFAIP3, ce qui altère la fonction de la protéine qu’il code (A20). Il en résulte une augmentation de l’activité de la voie NF-KB et donc un excès de production de molécules inflammatoires.

    Clinique

    Le syndrome auto-inflammatoire par haploinsuffisance de A20 commence tôt dans la vie, avec un tableau clinique  caractérisé par:

    • Atteinte cutanéomuqueuse (prédominante) : une aphtose unie ou bipolaire est quasi-constante. Il peut s’y associer une pseudo-folliculite ou des lésions pustuleuses type acné.
    • Atteinte digestive (fréquente) : des douleurs abdominales sont présentes dans 1/3 des cas, parfois associées à de la diarrhée +/- sanglante. Le plus souvent, elles sont chroniques et associées à une aphtose digestive pouvant toucher tout le tractus digestif. Chez 10 % des patients, il existe une colite inflammatoire sévère de survenue très précoce (dès les premières semaines de vie). Des lésions périanales (fistules périanales, abcès de la marge anale, aphtose périanale) sont décrites dans 15 % des cas.
    • Atteinte articulaire inflammatoire : rhumatisme inflammatoire chronique séronégatif touchant principalement les grosses articulations mais aussi arthralgies diffuses sans arthrite.
    • Atteinte hépatique : allant de la cytolyse biologique à la cirrhose inflammatoire dans 10 % des cas.
    • Auto-immunité : thyroïdite de Hashimoto dans 15 %, mais aussi lupus avec atteinte rénale, diabète de type I et cytopénies auto-immunes.
    • Lymphadénopathie : Dans 10 % des cas, peut être localisée aux ganglions cervicaux ou généralisée avec hépatosplénomégalie.
    • Atteinte oculaire : rare (<10 %). Elle se manifeste par une uvéite antérieure parfois associée à une atteinte du segment postérieur à type de vascularite rétinienne.
    • Atteinte cardiaque : très rare (<5%); des péricardites ont été rapportées.
    • Atteintes vasculaires : très rare (<5%), à type de vascularite cérébrale. L’HA20 a été comparée initialement à une maladie de Behçet monogénique, mais elle s’en distingue par la présence de poussées fébriles avec inflammation biologique (rare dans la maladie de Behçet), la fréquence des troubles digestifs et des stigmates d’auto-immunité (notamment thyroïdienne). Les atteintes cardiovasculaires et oculaires sont rares voire très rares. De plus, le HA20 commence tôt dans la vie et est de transmission familiale dans l’immense majorité des cas et l’on retrouve le plus souvent des symptômes évocateurs chez les membres de la famille au premier degré (un des parents).

    Biologie

    Les marqueurs de l’inflammation (notamment la CRP) peuvent être très élevés au moment des poussées (CRP >50-100mg/L). Certains patients peuvent garder une inflammation chronique.

    Environs 1/3 des patients présentent des stigmates d’auto-immunité, particulièrement des anticorps anti-nucléaires et des anticorps antithyroïdiens. Ils peuvent être associés à de véritables maladies auto-immunes.

    Évolution

    L’évolution du HA20 dépend de la gravité des atteintes de la maladie. Le plus souvent, elle est marquée par des poussées inflammatoires de résolution spontanée entrecoupées de rémission. Certains symptômes, notamment digestifs, peuvent persister en dehors des poussées inflammatoires.

    Dans la plupart des cas, il n’y a pas de mortalité liée au HA20. Cependant, les atteintes hépatiques et digestives graves peuvent menacer le pronostic vital. Un syndrome d’activation macrophagique a été décrit chez 3 enfants. Aucun cas d’amylose inflammatoire (AA) n’a été décrit.

    Prise en charge thérapeutique

    La prise en charge du HA20 n’est pas codifiée. Les poussées inflammatoires sont le plus souvent traitées par des corticoïdes ou des AINS à la demande. La colchicine semble avoir peu d’effet sur la prévention des crises inflammatoires mais peut être efficace sur la fréquence de l’aphtose buccale.

    Des immunosuppresseurs peuvent être prescrits en cas d’atteinte articulaire ou digestive (méthotrexate, azathioprine, thalidomide, cyclophosphamide, anti-TNF alpha). Des immunothérapies anti-cytokines (anti-IL1, anti-IL6) peuvent être utilisées chez les patients présentant une inflammation systémique importante. Les traitements anti-JAK ont été utilisés avec succès chez des patients avec une signature interféron positive. Une greffe de moelle osseuse a été réalisée chez 4 patients avec des résultats mitigés.

    La prise en charge des maladies auto-immunes associées est la même que chez les patients sans HA20.

    Il est probable que pour les patients avec HA20, une approche thérapeutique personnalisée basée en partie sur les taux de cytokines détectées soit la plus adaptée car il existe probablement une grande variabilité phénotypique qui complexifie l’établissement d’une prise en charge standardisée.